Yin Yang : la musique en noir et blanc
La
musique est souvent associée à une large palette d’émotions, que certains
artistes se représentent de plus en plus avec des couleurs. Aujourd’hui, on a
tendance à dire que les chansons ou les albums ont une certaine couleur grâce à
la tonalité des sons, par exemple. On parlera facilement de musique sombre ou
noire pour qualifier les œuvres des métalleux et autres hard-rockeurs, à cause
de leurs paroles pessimistes ou de l’ambiance peu chaleureuse de leurs chansons.
Mais on dit souvent qu’il ne faut pas juger un livre à sa couverture, et il en
est de même pour la musique. On aurait donc tendance aujourd’hui à donner trop
vite une couleur à un album ou à une chanson en se fiant uniquement à la tonalité
des morceaux, et non à la subjectivité et l’émotion transmises par l’œuvre. Pour
éviter les jugements trop précipités, certains groupes mettent les auditeurs
sur des pistes et leur donnant clairement la réponse à la question de la couleur de leurs morceaux et de leurs
albums. C’est ainsi qu’on dénombre bien des groupes qui utilisent sans
contraste, et avec simplicité, le noir ou encore le blanc.
Dans
tous les styles, du rap à la pop en passant par le rock et le punk, le noir est
bien omniprésent en musique. Tout a commencé dans les années 1970, plus
précisément en 1973, avec l’album de Planxty nommé officiellement Planxty, mais
que tous ont surnommé le ‘Black Album’. En 1977, les NON (groupe de dark folk
industriel) mettent pour une des premières fois de la couleur sur leur musique avec
leur opus intitulé The Black Album.
Va s’en suivre une longue liste d’œuvres musicales en tout genre portant ce
même titre de ‘The Black Album’. En 1979, les Rolling Stones pour un de
leurs fameux albums pirates (donc le titre ne fut pas choisi par eux) ; et
quelques mois plus tard, en novembre 1980, sort le Black Album de The Damned, un groupe de punk originaire de
Grande-Bretagne. En 1982, on se met à surnommer le disque Smell the Glove des Spinal Tap ‘The Black Album’ ; de même
pour l’album de Kino intitulé Kino,
en 1990 et pour l’album éponyme de Metallica de 1991. Puis c’est au tour de
Prince de se prêter au jeu des couleurs : en 1994, il sort son opus
intitulé… The Black Album, étonnant
non ? Et le phénomène se poursuit dans les années 2000. En 2002, le
rappeur français Akhenaton sort à son tour un opus intitulé The Black Album, et pareillement en 2003
pour le rappeur américain Jay-Z. Le groupe américain déjanté The Dandy Warhols
sort quant à lui en 2004 une compilation pour leur Black Album. Enfin pour compléter cette longue liste, le rappeur
Furax et le groupe de Hi-Hop Lunatic sortent en 2006 leurs opus intitulés (vous
l’aurez deviné) The Black Album.
En
musique, le noir a beau être synonyme de tristesse, de rage, de violence, et
caractériser plutôt certains styles comme le hardcore ou le métal, le blanc a
aussi une place à part pour désigner la pureté, l’élégance mais aussi la folie,
par exemple. Comme beaucoup d’artistes ont eu l’idée de créer un ‘Black Album’
selon ce que signifie leur musique pour eux, il est logique que d’autres aient
aussi eu l’idée de produire un ‘White Album’, correspondant à leur propre
définition de leur univers musical.
Évidemment
le blanc en musique doit surtout ses lettres de noblesse aux légendaires
Beatles avec leur prestigieux double album de 1968, sans titre véritable mais
couramment intitulé White Album, Double White Album ou The Beatles White Album. Néanmoins, on constate que le blanc est bien moins
utilisé que le noir pour symboliser les émotions d’une œuvre musicale puisque assez
peu d’artistes ont créé un réel ‘Album Blanc’. Le noir a donc la préférence des
musiciens puisqu’il existe à ce jour très peu de galettes intitulées ‘White
Album’ en tant que tel. En revanche on peut trouver des variantes : ainsi The
White Stripes en 2001 avec leur White
Blood Cells, ou encore Shaka Ponk avec The
White Pixel Ape en 2014, par exemple. En 1978 pour son premier album, le
groupe anglais XTC revendiquait, quant à lui, carrément le droit de faire de la
White Music (en poussant très loin le
jeu du blanc puisque le titre était presque illisible sur la pochette du vinyle
car imprimé en blanc sur blanc !).
Cela
nous laisserait donc penser qu’en musique on utilise bien plus le mot « noir »
que le mot « blanc » pour représenter les morceaux d’un album, car il
est peut-être plus symbolique et plus simple à manier en terme d’émotions
transmises par la musique, que son contraire, le blanc.
Pour
terminer ces quelques considérations colorées, notons que plusieurs groupes se
sont montrés partisans du Yin et du Yang en ne choisissant pas entre ces deux
non couleurs que sont le noir et le blanc, ou plutôt en associant les deux.
C’est le cas de The Stranglers avec leur album de 1978 tout simplement intitulé
Black and White ; de The Hives
avec The Black and White Album ;
ou encore de Lenny Kravitz et son album Black
and White America sorti en 2011. Peut-on aller jusqu’à dire que ceux-ci font
la preuve que passer de noir à blanc sans contraste est possible dans tous les
sens du terme et inversement ? Libre à chacun de l’interpréter comme il le
désire.

Note :
liste non exhaustive
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